Les secrets des huiles
M. Roder, producteur d’huiles locales nous parle de son activité.
Retrouvez les produits de M. Roder et toute l’équipe de l’association Carthagène par ici : Association Carthagèn
On utilise le terme chimique « lipide » pour désigner l’ensemble des molécules des matières grasses. Ces derniers regroupent les huiles et les graisses. Une huile, en alimentation, est un corps gras qui est à l’état liquide à température ambiante et qui ne se mélange pas avec l’eau. L’huile est composée de différentes molécules : les acides gras, les triglycérides et les phospholipides.
Il existe 4 différentes familles d’acides gras qui se distinguent par leur structure chimique :
- Saturés – principalement présents dans les viandes et les produits laitiers, mais aussi dans certaines huiles et aliments raffinés.
- Monoinsaturés – l’acide oléique, principal acide gras des Omega-9, sont présents dans l’huile d’olive, de colza, d’arachides, d’oléagineux et de tournesol HO.
- Polyinsaturés – dont les Oméga-3 et les Omega-6 font partie. Les Omega-3 sont très présents dans les huiles de poisson, de lin, de carthame et de colza. Les huiles les plus riches en Omega-6 sont l’huile vierge de chanvre, de maïs, de colza et de tournesol.
- Trans – acides gras insaturés fragiles qui résultent principalement d’un procédé industriel. Ils sont plus nocifs pour la santé que les acides gras saturés.
Certains acides gras ne peuvent pas être fabriqués par notre organisme, c’est pour cela qu’ils sont appelés acides gras essentiels et proviennent uniquement de l’alimentation. C’est le cas des acides gras Omega 3 (acide alpha-linolénique) et Omega 6 (acide linoléique).
Les matières grasses dont l’unité de mesure sont les acides gras peuvent former différentes molécules et remplir plusieurs fonctions :
- Assurer la bonne communication entre les cellules qui servent à la production des hormones et molécules d’inflammation et cicatrisation.
- Assurer la structure cellulaire – par exemple – la membrane cellulaire (la délimitation de la cellule) est composée de phospholipides.
- Assurer l’assimilation des vitamines A, D et E. Ces vitamines aiment la présence de gras.
- Assurer le stockage d’énergie : les acides gras stockés, sous forme de triglycérides, sont une réserve d’énergie dans le tissu gras.
- Assurer la disponibilité d’énergie dans les périodes de jeûne : Les triglycérides sont employés par notre organisme lorsque on manque de sucre dans le sang.
Il existe 3 méthodes pour extraire l’huile des graines :
- La pression à froid
- La pression à l’ancienne (qui intègre la torréfaction)
- La pression industrielle (qui intègre le processus de raffinage)
La pression à froid :
La pression à froid est un processus très doux qui consiste à extraire l’huile sans traitement thermique ou chimique. En général les graines sont broyées, et à ce stade on sépare l’huile « primaire » des tourteaux (les matières solides). Dans le processus de broyage la température augmente à cause du frottement entre la graine et le support de broyage. Pour avoir une huile pressée à froid, la température ne doit pas excéder 50 °C. L’huile primaire est ensuite décantée puis filtrée, pour enlever les derniers petits résidus, avant d’être mise en bouteille.
Ce processus est simple, sans traitement thermique ni chimique. Il permet de maintenir les arômes originaux et tous les éléments nutritifs intacts, notamment les acides gras essentiels et les vitamines. La pression à froid a un rendement/production d’huile inférieur aux autres méthodes.
La pression à l’ancienne :
La pression à l’ancienne est une méthode similaire à la pression à froid avec la présence d’un traitement thermique : la torréfaction. Les graines sont chauffées à plus de 120°C et sont broyées. Ce passage garantit la caramélisation des sucres (par la réaction de Maillard) et permet une meilleure extraction des matières grasses. Avant la mise en bouteille, l’huile est décantée et filtrée.
Ce processus permet d’ultérieurement aromatiser l’huile et de maximiser son extraction. Les hautes températures dégradent des nutriments comme les vitamines ainsi que les acides gras Omega-3.
La pression industrielle :
La pression industrielle, contrairement à la pression à froid, extrait l’huile en ajoutant un traitement thermique et chimique : le raffinage. L’huile obtenue après la décantation passe par des processus très complexes afin d’homogénéiser et de standardiser l’huile.
L’huile est privée de ses pigments, de ses molécules aromatiques, des phospholipides, des glycérides et tous autres types d’impuretés. On obtient une huile privée de certaines de ses vertus mais elle est plus stable : elle se conserve plus facilement et plus longtemps. Toutes les huiles ont un « point de fumée », c’est-à-dire la température à laquelle les huiles et les graisses émettent de la fumée et sont donc toxiques. Le point de fumée des huiles raffinées est plus élevé.
Il faut toujours choisir les huiles selon leur composition et leurs caractéristiques : si l’huile contient beaucoup de nutriments/vitamines et/ou des acides gras Omega-3, il est préférable de l’utiliser à froid, car la chaleur détruit ces éléments. Une huile riche en acides gras Omega-9 sera plutôt utilisée pour la cuisson car elle sera plus résistante à la chaleur.
- À froid : les huiles pressées à froid comme : l’huile de colza, l’huile de lin, l’huile de cameline, l’huile de chanvre et l’huile de noix.
- Cuisson à chaleur moyenne : l’huile d’olive raffinée, l’huile de colza raffinée, l’huile de colza HOLL et l’huile de tournesol HO. Ce sont des huiles riches en acides gras Omega-9 plus résistantes à la chaleur. Les huiles raffinées ont un point de fumé plus élevé et sont aussi plus stables.
- Cuisson à chaleur élevée : l’huile de colza HOLL et huile de tournesol HO. Ce sont des huiles riches en acides gras Omega-9 parfaites pour les hautes températures. Si ces huiles sont raffinées elles seront plus stables et supporteront mieux les hautes températures.

C’est une huile qui provient du tournesol HO (High Oleic), une variété de tournesol. Le tournesol HO est riche en acide oléique, acides gras monoinsaturés (Omega-9).
Huile de colza HOLL
Cette variété de colza, le colza HOLL (High oleic – Low Linolenic) produit une huile riche en acide oléique (acides gras Omega-9) et pauvre en acide linoléique (acides gras Omega-6). C’est donc une huile parfaite pour les hautes températures.

Le rancissement est l’oxydation/la dégradation des huiles. L’huile rance est impropre à la consommation. On reconnait une huile rance par son altération dans le goût, l’odeur et la couleur. Les huiles raffinées sont généralement plus stables et se conservent plus facilement que les huiles plus riches en nutriments, qui sont plus sensibles. En règle générale :
- Eviter d’ajouter de l’eau ou des éléments riches en eau
- Eviter la chaleur : surtout pour les huiles riches en acide gras Omega-3, qu’il est préférable de mettre au frais.
- Eviter le contact avec l’air : utiliser un récipient hermétique.
- Eviter l’exposition à la lumière : utiliser des bouteilles foncées et les stocker à l’abri de la lumière.
L’huile est une denrée produite et consommée dans le monde entier. Le premier impact environnemental de celle-ci est le mode de production de la graine ou du fruit. Le second est son importation. Il existe différentes huiles importées comme l’huile de coco ou d’avocats. L’huile de coco est produite sur d’immenses monocultures au détriment des forêts. Une production massive et en monoculture détruit l’écosystème et menace les espèces. L’impact environnemental peut aussi être calculé par la quantité d’eau nécessaire pour irriguer ces monocultures. Par exemple, pour produire 1 avocat, il faut 70 litres d’eau.
La production d’huile en Suisse est très variée. On a l’avantage d’avoir une production d’huile qui couvre tous les types d’utilisations dans la cuisine comme l’huile de noix, de noisette, de colza, de colza HOLL, de tournesol, de tournesol HO, de lin, de chanvre etc. Au-delà de son avantage d’être locale, les producteurs réutilisent les déchets : par exemple les tourteaux de la fabrication des huiles sont donnés au bétail ou la plante de lin est aussi utilisée pour la production de fil.
Il est donc recommandé de consommer en priorité des huiles locales. Différents labels garantissent la provenance, le mode de production et l’équité du produit comme par exemple les labels GRTA et PER.
Il n’y a pas d’huile végétale parfaite, chaque huile apporte en quantités différentes les molécules d’acides gras et de vitamines.
- Utiliser des huiles riches en acides gras Oméga-9 (l’huile de tournesol HO et l’huile de colza HOLL) pour la cuisson des aliments. Les versions industrialisées ont une meilleure stabilité.
- Utiliser des huiles pressées à froid et à l’ancienne pour la consommation à froid.
- Utiliser fréquemment des huiles riches en acides gras Oméga-3 à froid comme l’huile de lin, l’huile de chanvre…
- Protéger les huiles de l’eau, de la chaleur, de la lumière et de l’air.
- Jeter les huiles rances qui sont altérées au niveau du goût, de l’odeur et de la couleur.
- Préférer l’utilisation des huiles locales.


